Koïs, théorbe, archiluth, viole de gambe et... banjos.

Patricia Stefanelli joue son théorbe réalisé par Éric.

Éric Stefanelli a rejoint les étoiles à l'automne 2025. Bien trop tôt, laissant un grand vide dans le coeur de nombre d'entre nous.

Mais sa "patte" de luthier aura eu le temps de marquer la musique de bien des musiciens et musiciennes, en France, en Europe, mais aussi en Chine au Japon, ou aux États-Unis.

Rencontre en Bourgogne avec Patricia Stefanelli et des instruments étonnants.

Éric Stefanelli s'est intéressé très tôt à la lutherie et, dès l'âge de 17 ans, a reçu une formation de facteur d'orgue auprès d'un compagnon, lui donnant l'occasion de travailler à la restauration d'instruments dans des chapelles et églises autour de Nice. Puis, il reçut l'enseignement du luthier Olivier Fanton d'Andon (guitare classique).

La facture d'instrument de musique baroque débute pour lui en 1991, après une période d'entreprenariat dans l'élevage de carpes koïs et poissons d'ornements (tiens, déjà la marque du Japon). Patricia et Éric s'installent en bourgogne dans une vieille maison de famille à restaurer, d'abord avec un tout petit atelier au grenier, puis agrandissement par la suite. Éric participe alors à des expositions et conférences, et commence à se faire une petite clientèle.

Serge Leclerc, alors directeur de l'Alliance Française au Japon, lui commande un luth, et s'établit alors une véritable amitié, notamment autour de la culture japonaise. Serge l'invite à venir à Tokyo, où il donne quelques conférences et reçoit des commandes d'instruments de la part de professeurs de luths et de théorbes.

Puis c'est la Chine où Serge Leclerc part gérer l'Alliance Française. Viennent d'autres commandes et le beau souvenir d'un concert de banjo ragtime en costumes à Cheng Du.

Ainsi sont nés des violes de gambes, des théorbes, des guitares renaissances, luths baroques, archiluths, luths théorbés, trompettes marines et nombre de luths.

Patricia joue aujourd'hui, sur un théorbe réalisé par Éric, des pièces musicales remontant jusqu'au XVIe siècle (1530 environ), notamment des dances très rythmées.

Ci-après, extrait vidéo d'une formation éphémère créée pour l'open mic de Bluegrass en Morvan 2024, avec Alex Neff (fiddle) et Vincent Bonnin (guitare).

Les ouïes d'un archiluth Stefanelli.

Patricia Stefanelli et un archiluth réalisé par Éric.

Des rouleaux de cire, tous enregistrements anciens de musique de banjo.

C'est bien plus tard en 2008, qu'il s'ouvre encore plus à l'univers du banjo qui s'avère, aussi, bien plus ouvert et chaleureux que celui de la musique baroque. Éric confie à Patricia qu'il se sent véritablement en lien avec cet instrument. "C'était un être passionné qui aimait la vie et s'intéressait à énormément de choses", petite flamme transmise par son grand-père Henri Pravaz (famille de l'inventeur de la seringue) qui lui offrit son premier banjo. Éric a ainsi joué du banjo dès l'âge de 15 ans jusqu'à sa dernière année à 69 ans.

Viennent les nombreuses rencontres autour de cet instrument, voyages, notamment à Chicago, où Patricia et lui jouent ragtime, et des années de vie et de passion. Plus d'infos et détails sur la vie d'Éric Stefanelli et de sa complicité avec le banjo dans cet article paru à l'automne 2024.

La dernière fois que j'ai entendu Éric jouer fut à Bluegrass en Morvan 2024, au Lac des Settons, tout simplement, lors de la scène ouverte. Il a livré au public un jeu en clawhammer d'une fluidité étonnante, un beau et vrai moment de magie. Nous eûmes par la suite plusieurs conversations téléphoniques au sujet de la fabrication de mon propre banjo sur le modèle de son prototype, puis de projets de stages et concerts, mais l'histoire s'arrête hélas ici. Au delà des habituels regrets à la perte d'un être cher, j'ai vraiment eu l'impression de croiser trop brièvement la vie d'une personne lumineuse. J'y pense bien évidemment chaque fois que je prends mon banjo.